Il avait un avion pour partir en tournée.
Il avait un avion qu'il aimait piloter.
Sur le bruit du moteur, il chantait, modulait.
Il venait aux concerts légèrement surmené.
Mais c'était bien moins long qu'en auto ou à pied.
Il volait pour qu'on plane, là au moins, ça roulait.
Ça roulait, ça tanguait, ça voulait chavirer,
Mais en pilote expert, toujours il redressait.
Et charmant nos esprits chaque fois qu'il entonnait
Ses refrains éclairés, là encore il volait.
Sa musique virevoletait, il nous faisait tanguer.
Et en chanteur sincère, toujours il envoûtait.
Ses couplets ingénus, loin d'être biscornus,
Chevauchaient des airs purs, il cherchait l'absolu,
Sans être terre-à-terre, il était au-dessus,
Pêchant des utopies désormais révolues.
Il parlait, il chantait, comme son moteur bourru.
Il aurait mérité d'être plus reconnu.
Un jour, il est parti et n'est pas revenu,
Je me demande encore comment je l'ai su.
Car les journaux ne parlèrent pas de son avion,
Encore moins, les médias n'évoquèrent ses chansons,
Il est monté au ciel ignoré, oublié,
Oui mais moi qui l'aimais, quand je vois un avion,
Traverser l'horizon, je me dis «Nom de nom»,
Je me dis «Tiens, y'r'part en tournée, Béranger».
«Tiens, y'r'part en tournée, Béranger».
François Béranger est un de mes maîtres. Il m'a énormément
apporté non seulement par ses idées et ses textes,
mais également par ses musiques, diverses, simples
et pourtant inspirantes.
Cette musique est vraiment caricaturale d'un de ses styles.
Même la voix est caractéristique.
C'est un grand méconnu du grand public, comme c'est dommage.
Sa disparition est vraiment passée inaperçue.
Du temps où je l'écoutais de son vivant, je ne savais pas qu'il
pilotait.
C'est dans une vidéo posthume offerte par mon ami Didier
que j'ai découvert ce talent. Il fréquentait l'aéro-club
d'Uzès.
La chanson pourrait laisser croire qu'il a disparu dans
son avion,
mais non.