J't'appellerai pas non plus l'anar,
Tu ne le fus pas toujours,
Je t'appellerai donc Ferré.
Je crierai ton nom dans les tunnels obscènes.
Ta voix répondra qu'il n'y a vraiment plus rien,
Qu'avec le temps, la mort est délivrance.
Il se peut qu'au loin, dans la mer qui cavale,
Je perçoive soudain un bon vieux limonaire,
Que je me voie, devant un verre de bière,
En regardant loin, dans la glace du comptoir,
J'entendrai ton piano, tes vociférations,
Je retrouv'rai tes lèvres, quand tu chantais Pépée.
Ton sourire extatique, en raillant le bourgeois,
Ta crinière angélique dans le halo d'aura,
Tes psaumes diaboliques, tes commandes sataniques.
Tes disques sont usés, tes sillons sont grinçants,
Les ai bus si souvent, qu'ils m'enivrent encore,
Tes mots sont graffiti qu'on ne peut effacer.
Dans le brouillard des tubes où je hurle ton nom,
Tu embrases l'horizon, gardien de phare de ma génération,
Si nos fils t'écoutaient, ils deviendraient moins cons.
J'ai au fond d'mes neurones de tes contradictions,
De ta folle dérision, un optimisme profond,
Le magnétophone de ta voix qui s'est tue ?
(Non, elle ne s'est pas tue, et je crie encore "Ferré,
fais-moi une chanson !"
Tu me l'as inspirée,)
C'est ma profonde émotion.
Je suis affairé, comme abbé... abbé rangé
!