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Récit de voyage "Travellers cheques" par Jac PETIT-JEAN-BORET

TRAVELLERS CHEQUES


Lors de notre voyage en moto en Inde, tout notre avoir financier consistait en travellers cheques de l'American Express. Bloqués à Istambul par les pannes électriques successives,
nous essayions tant bien que mal de trouver des solutions. Un petit garage grec voulait bien réaliser l'astuce imaginée par Gérard pour recharger la batterie, notre dynamo semblant être la cause du problème, monter en parallèle une dynamo d'Opel. Même d'occasion, il fallait changer des chèques de voyage pour payer le garagiste. J'essayai cette manoeuvre dans diverses banques, impossible. Peut-être à la gare, nous dit-on. Mais il était bientôt six heures du soir et tout allait fermer, le weekend commençait.

Je partis pour la gare en bus avec un certain Jean-Louis, routard comme nous et partageant notre chambre à la pension Sultanahmet. Il était un peu décalé avec sa grosse gourde du surplus attachée à sa ceinture.
A la gare, pas de change non plus, les Americains n'avaient pas la cote en ces régions déjà orientales. Il fallait aller à l'hôtel Hilton à Taksim, où se trouvait l'agence du Türk Express.
Re-bus. Arrivés à l'Hilton, le bureau était encore ouvert. Chance ! L'agent nous reçut courtoisement, mais il était désolé, il n'avait plus de liquide. Je l'implorai en vain et après dix minutes, il eut une idée : la caisse de l'hôtel était juste en face. Je m'adressai donc au caissier qui accepta instantanément de me changer mes bouts de papier. Etais-je résident dans l'hôtel ? Non, alors impossible... Encore dix minutes de palabres avant qu'il ne trouve une solution éventuelle. Si j'allais consommer au restaurant, je pourrais peut-être payer avec ma monnaie troublante. Il fallait demander au chef.

Je me dirigeai donc vers le restaurant et à travers la porte, je vis les clients ou plutôt les clientes très chicos. Je pris peur et revins sur mes pas. Une boutique de tissus dans la galerie étant encore ouverte, j'y entrai pour demander à la tenancière si elle croyait mon opération possible. Il y avait un client dans la boutique. Vêtu d'un pagne blanc, d'une peau de léopard, un cendrier en or sur la tête, ce prince africain qui avait entendu ma question se proposa fort gentiment d'aller la poser lui-même au chef. Je retournai donc au restaurant en cette compagnie insolite et je restai dehors, laissant mon prince faire la démarche. Il revint en m'assurant qu'en prenant simplement un thé, je pourrai payer avec mes dollars.

Je retournai donc chercher Jean-Louis resté à l'entrée de l'hôtel et nous entrâmes, moi en tenue de motard et lui avec sa gourde. La salle était bien remplie. Les conversations s'arrêtèrent net, et nous devînmes le point de mire général. Nous choisîmes donc une petite table à l'écart. En me bourrant une pipe, je laissai tomber du tabac sur la nappe et j'étais en train de nettoyer lamentablement quand le garçon vint à nous. Nous voulions juste deux thés. "D'accord, mais pas à cette table. Suivez-moi !". Il nous emmena à la table la plus centrale, nous étions particulièrement gênés, surtout moi en réalité, car Jean-Louis était plutôt "engourdi".
Dans un merveilleux service, un thé à l'anglaise apparut. Délicieux. Je commençai à m'adapter à la situation en trouvant tout cela tellement cocasse qu'il fallait en profiter et voir la vie en bonbon. Les conversations avaient repris et on nous ignorait carrément. Après une bonne demi-heure pour siroter cet excellent breuvage, nous payâmes sans problème.
Le thé était moins cher que celui du Pudding Shop (le café des routards) qui n'était que du pipi de chat. Victoire, nous allions pouvoir installer cette dynamo prometteuse.

Pour la petite histoire, le garagiste grec était si malhabile que nous fîmes la transformation nous-mêmes. Ça fonctionnait. Nous allions enfin pouvoir poursuivre notre voyage vers l'Inde. Nous partîmes donc de bon matin avant le jour, le coeur en liesse. La nuit était comme un four. Tout d'abord, il fallait changer, non plus des chèques de voyage, mais bien de continent. Quitter l'Europe et continuer en Asie si proche, juste de l'autre côté du beau Sphore.
Le plus simple, mais aussi le plus cher à cause du péage, était de passer le tout nouveau pont suspendu façon Tancarville. Nous le fîmes, payâmes le péage et cinq cent mètres plus loin, notre sytème explosa ! Fin du voyage avec la moto, il fallait poursuivre autrement.
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