Ferme souquant vers le rivage,
Le mur d'en face grandissait.
Il me faudrait bien du courage
Pour jusqu'au sommet l'escalader.
Arrivé au pied de la paroi,
Pas de bon endroit pour affaler.
J'en étais quitte avec émoi
Pour laisser ma barque dériver.
Je ne raconte pas de fadaises,
Je comptais gravir la falaise.
Je n'étais pas vraiment à l'aise,
Mais je jurais y arriver.
Poussant du pied mon batelet,
D'un bond, je parvins à sauter.
Je me sentais très diminué,
Mais je devais jusqu'en haut grimper.
Le calcaire était très glissant
A cause des fientes des goëlands.
Je progressais péniblement,
Bien trop lentement, mais sûrement.
L'ascension était une ascèse.
Je devais me montrer balaise.
J'apercevais la côte anglaise,
Certainement de Douvres la falaise.
De leurs geôles, hier évadé,
Je regagnais le sol français.
Pas le temps de philosopher.
Il me fallait plutôt m'agripper.
Parvenu en haut de cette falaise,
La surprise était bien mauvaise.
Mon exploit n'était plus que foutaise.
M'y attendait l'armée anglaise...
Et je repartis prisonnier.
Dans la nuit, je m'étais trompé.
Et c'est vers le côté anglais
Qu'en demi-tour, j'étais ramené.
J'avais bien perdu la Manche.