Bien que gardien de ma tour,
Très isolé avec la mer autour,
J'ai été bien obligé de la voler.
Oui, j'ai piqué mon phare.
Une sirène ayant échoué
Un jour d'ennui sur mon aride îlot.
J'étais sorti pour l'aider.
La rescaper et la remettre à flot.
Mais elle me dit qu'elle voulait rester.
C'était un souhait, elle m'en chanterait.
Elle était harassée d'être mouillée,
Et désirait visiter mon foyer.
Je trouvais ça étrange, mais j'acceptai,
Assez sceptique sur sa capacité
A surnager au sec, si loin de l'eau,
Et que mon phare devienne alors son tombeau.
Elle se sécha dans la cabine
A la chaleur de mon adrénaline
Qui me brûlait au rouge vif.
Et j'ai piqué, oui j'ai piqué mon fard.
Elle vieillit en se desséchant,
Et de ses soeurs sirènes, se languissant.
Elle dût partir, quel déboire,
Fit ses adieux à notre tour d'ivoire.
Je dus promettre et jurer de la visiter.
Bien sûr je commençais
A m'accoutumer, à l'aimer.
Mais elle repartit dans une triste plongée.
Redevenu solitaire, je guettais.
Le temps passait et mon phare éclairait
A bien des lieues, une mer vide qui écumait.
Je désirais renoncer à mon métier.
Quand ma carrière s'acheva,
Je descellai mon phare, le pris sous mon bras.
Allai le poser sur un îlot
Où ma sirène m'avait dit fendre les flots.
Bientôt elle échoua pour me déclarer
Qu'au grand jamais, elle ne reviendrait.
Elle était harassée d'être séchée.
Je devins hagard quand elle piqua mon phare
Et le noya...
Depuis, j'attends sur mon rocher
La grande vague qui me fera l'oublier
Et me verra retrouver mon phare noyé
Dans une dernière plongée.
Attention
aux sirènes !
Mesure à sept temps.